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Femmes Kamikazes : woman bomb sème la mort au lieu de la vie

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STOP !!!!   Ça suffit, j’en ai assez.

J’ai le sentiment que l’annonce d’un attentat chasse l’autre.

Hébétées, révoltées, groggy… Nous avons été Charlie, Paris et, depuis ce début d’année nous sommes Bruxelles, Zliten, Istanbul, Ouagadougou, Tel Aviv, Bagdad, Peshawar, Kaboul, Jalalabad, Bruxelles…

Sentiments diffus et mélangés de peur, d’inquiétude et d’incompréhension

Tout d’abord, j’ai peur que l’on s’habitue : que la violence, cette forme de violence fasse partie du quotidien et que les attentats deviennent un risque comme un autre, au même titre que les accidents de la route ! J’ai peur qu’un jour, on nous annonce au 20h le décompte mensuel des morts par attentats et l’on compare les statistiques d’une année sur l’autre !

C’est ça : j’ai peur que l’horreur devienne des statistiques: des courbes et des camemberts.

Tout le monde se souvient des attentats du Word Trade Center, chacun sait où il se trouvait, au moment où la stupeur s’est mêlée à l’incrédulité. On a la même attitude face à ceux de Paris qui nous touchent particulièrement… Mais ensuite… qui sait la date de celui de Bagdad ? qui sait combien de morts à Jalalabad? Un scoop chasse l’autre ; mais surtout c’est le signe, je le crains, que le monde s’habitue à l’horreur

Les attentats du Cameroun me laissent un goût particulièrement amer car ce sont le plus souvent des femmes et des adolescentes qui officient en donneuses de mort. En janvier une trentaine d’attentats suicides ont faits près de 100 morts. Le 25 janvier, quatre adolescentes bardées d’explosifs se font exploser sur le marché de Bodo au nord du pays tuant plus d’une trentaine de personnes.

La vie n’a-t-elle plus d’autre valeur que le retentissement médiatique qu’elle suscite lorsqu’elle se termine ? Le choc est plus grand lorsqu’une femme est l’origine de cette fin de vie brutale ; L’inconscient collectif peinant à associer la symbolique de la femme qui enfante, qui donne la vie, à l’image de celle qui tue de cette façon barbare, n’hésitant pas à frapper des innocents qui ressemblent à ses propres enfants.

Et moi aussi j’ai du mal à admettre cela !

Je sais que nous ne vivons pas au pays des Bisounours avec des jeunes filles en fleurs, des femmes aimantes et tendres et des grands-mères gâteaux ! Moi-même, si on fait du mal à ceux que j’aime, je pense que j’aurai envie de tuer.. Mais jamais de cette façon aveugle!!

Historiquement les « kamikazes » japonais constituaient une armée régulière qui combattait des objectifs militaires ; Sans applaudir des deux mains à cette pratique, on est tout de même loin du terrorisme où les cibles sont des civils, et où les actions se situent clairement en infraction au « droit de la guerre ». Je suis révoltée quand je me souviens des guerres ancestrales où les femmes ont été butins, trophées ce qui me révolte au plus haut point ! Mais maintenant voilà que certaines deviennent des armes et là je suis en colère.

Et ma colère grandit car l’on regarde de plus près, le phénomène des kamikazes femmes, s’il restait encore rare jusque dans les années 80, a tendance à s’amplifier. Selon les endroits du monde l’explication de leur geste n’est pas toujours la douleur poussée jusqu’au sacrifice à laquelle on pourrait s’attendre ; cette douleur paroxysmique qui empêche de raisonner et qui peut donner l’illusion que la mort, à laquelle on donne un sens par cette action, est la seule option possible

Qui sont-elles ces femmes ? Entre 2002 et 2003, Julija Jusik, journaliste russe, s’est livrée à une enquête en Tchétchénie pour tenter de comprendre ces femmes qui s’étaient faîtes exploser au cours de différents attentats.

Elle a rencontré leurs familles et amis. Le résultat de ses recherches met en lumière le fait que les femmes choisies étaient souvent en marge de la société classique où l’existence ne peut se construire que dans la dépendance d’un homme : des orphelines ou des sœurs, femmes ou mères de combattants tués.[1] Elles étaient recrutées dans des villages reculés et les pourvoyeurs qui élevaient cette chair à canon étaient connus et identifiés. Souvent d’ailleurs la charge était actionnée à distance…par des hommes !!

En 2002, Waffa Edris, infirmière palestinienne se fait exploser en plein Jérusalem. Avait-elle le choix ? Répudiée par son mari du fait de sa stérilité, elle vivait dans un camp avec sa mère.[2]

Dans une étude sur les femmes kamikazes, Iqbal al Gharbi[3] avance la théorie que la participation des femmes musulmanes au Dijhad est une façon d’accéder à l’égalité et de proposer une autre vie que celle d’épouse ou de mère. « Et, au prix de leurs sacrifices, les femmes kamikazes trônent à titre posthume sur les posters et les fresques allégoriques consacrés aux glorieux martyrs de la nation. ».

J’enrage de voir que leurs existences n’ont pas d’autre prix que celui que certains hommes veulent bien consentir à donner.

Pour celles qui participent au Dijhad du sexe, le Nikah, en allant s’offrir aux soldats c’est pire : elles n’auront pas le même traitement «  de faveur ». Leur rôle est nié, oublié et l’horreur de la situation est cachée derrière un pseudo mariage temporaire !

Ainsi les femmes kamikazes seraient les premières manifestations de la construction d’un rôle et d’une identité féminine dans un monde où le corps des femmes est vu par les hommes comme « un lieu d’exercice de pouvoir ». Bof… j’avoue être dubitative : CE N’EST PAS UNE AUTRE VIE , CE N’EST QU’UNE AUTRE MORT ! Et même si pour reprendre l’expression de Simone de Beauvoir, « on ne naît pas femme, on le devient », j’avoue ne pas savoir dans quelle étape du processus de construction de l’identité féminine, on peut faire une place au terrorisme.

Bien sûr que certaines batailles ne peuvent se livrer que dans la violence, mais là il me semble que c’est l’essence même de l’être humain et spécialement de la femme qui est bafouée; Comment apprendre aux femmes concernées qu’elles ont droit à une place à part entière dans la société?

C’est LA QUESTION: pourtant les ONG s’en préoccupent peu et je sais que l’on va m’objecter la fameuse pyramide de Maslow pour m’expliquer qu’il y a des besoins primaires à satisfaire avant tout, et que franchement les droits des femmes, c’est pas le projet du moment quand c’est la vie qui est menacée.

Mais il me semblait important d’en parler, c’est ma maigre contribution car je voudrais croire qu’il y aura pour ces femmes un avenir et on ne parle même pas de meilleur, mais… d’avenir tout court !

Je le voudrais de toutes mes forces, car il y aurait une lueur d’espoir parmi tout cela,  en attendant j’ai envie de pleurer sur toutes celles qui n’ont pas le choix, pleurer … parce-que je suis une femme … mais de rage,  comme les garçons !.

[1] « Les fiancées d’Allah »Julija Juzik- Presse de la cité-  avril 2005

[2] Kamikaze 47, l’histoire de Wafa Idriss

[3]  « De la femme kamikaze au Djihad du sexe : une guerre faite sur le corps des femmes ». Iqbàl al GHARBI Université la Zitouna Tunis:

 

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